Un nouvel emploi combine souvent l’excitation des débuts et une certaine nervosité. Le premier jour, vous vous présentez à vos collègues et vous vous familiarisez avec le travail que vous allez faire. En général, le processus est classique. Mais que se passe-t-il lorsque le monde est propulsé dans une pandémie et que les règles habituelles ne s’appliquent plus?

Comme si 2020 n’était pas déjà assez chaotique, j’ai également eu la chance de commencer à travailler chez Hébergement femmes Canada en tant que nouvelle coordinatrice des communications et du développement! Aussi formidable que soit ce nouveau chapitre de ma carrière, je dois dire que de le vivre à un moment comme celui-ci est une expérience tout à fait unique. Bien sûr, j’étais un peu craintive de devoir rencontrer mon équipe de façon complètement virtuelle. Je suis habituée à créer des liens par le biais de conversations au bureau et de repas au nouveau restaurant en ville. Mais nous avons fait de notre mieux dans les circonstances avec une petite réunion d’équipe dans le jardin de notre DG, à deux mètres de distance, par une chaude journée d’automne à Ottawa. Le premier jour, notre DG a également déposé des pâtisseries à partager lors de ma première réunion sur Zoom. Je suis reconnaissante envers une équipe qui a tout fait pour rendre mon expérience aussi personnelle que possible.

2020 a été une année particulièrement difficile en ce qui a trait au travaille à domicile. Le fait de devoir rester chez soi a brouillé les frontières entre vie personnelle et professionnelle qui se déroulent toutes deux au même endroit. Cela a entraîné de nombreux problèmes pour tout le monde, notamment une hausse des problèmes de santé mentale, une productivité interrompue par les animaux domestiques et les enfants, et des heures de travail prolongées alors que nous devons nous occuper de parents et de proches vulnérables. Ce qui ressort pour moi, et pour beaucoup d’autres personnes de couleur, c’est le cycle de nouvelles en cours sur les PANDC (personnes autochtones, noires et de couleur) qui sont régulièrement agressées, ignorées par le système judiciaire et, dans le pire des cas, assassinées.

Partout dans le monde, les PANDC continuent de recevoir chaque jour le message qu’il est impossible d’échapper au racisme institutionnel, à l’industrie des prisons et à la colonisation, et qu’en fin de compte, ce monde n’est pas fait pour que nous y prospérions. Nous avons appris très tôt que cette discrimination existe vraiment, mais la triste vérité est généralement bien dissimulée. Pendant la pandémie, on n’a pas pu ignorer les meurtres violents de George Floyd et de Breonna Taylor, la mort de Regis Korchinski-Paquet, les violations du traité avec les Mi’kmaq, la brutalité policière envers les personnes noires et autochtones pendant les manifestations, et bien d’autres choses encore.

La population du Canada s’est rendu compte que oui, ce genre de choses se produit ici – et elles se produisent souvent. Les populations noires et autochtones sont surreprésentées dans le système carcéral canadien. Les PANDC gagnent en moyenne moins d’argent et subissent d’innombrables micro-agressions qui sont comme une mort à petit feu. Les femmes noires et autochtones (en particulier transsexuelles) sont également plus susceptibles d’être victimes d’agressions sexuelles. Il y a encore beaucoup à dire sur les réalités que vit notre communauté, mais en raison du manque de recherches diversifiées dans des secteurs comme celui de la santé, nous ignorons dans quelle mesure les personnes de couleur sont réellement touchées par le racisme.

Tout cela pour dire qu’il a été très difficile de travailler en tant que femme de couleur pendant cette période. À certains moments, les médias sociaux ont accaparé toute mon attention et il m’était impossible de me concentrer sur le travail à accomplir. Bon nombre d’organisations ont vu le climat actuel comme une occasion de développer des politiques de diversité et d’inclusion qu’elles pourraient ou non adopter à long terme. Elles confient souvent le gros de ce travail à des personnes de couleur, qui doivent déjà faire face à des traumatismes et aux innombrables courriels des collègues et de la direction leur demandant, «Ça va?».

Dans l’ensemble, nous n’allons pas très bien – mais comme nous l’avons toujours fait et continuerons à le faire, nous persévérons. Nous soutenons nos communautés et luttons pour la justice par des manifestations, l’élection de PANDC à des postes politique et l’éducation. J’essaie de pousser mon travail plus loin. Au départ, je travaillais pour des organisations internationales de défense des droits des femmes, mais avec ce nouveau poste chez HFC, je me concentre sur la violence faite aux femmes (VFF) au niveau national et au soutien des maisons d’hébergement de tout le pays. La pandémie a mis en lumière la nécessité de prioriser la lutte contre la VFF dans notre propre pays. On pense souvent qu’en tant que pays du «premier monde», nous jouissons de nombreux privilèges, notamment d’espaces sûrs pour nos plus vulnérables. Mais pour beaucoup, y compris les femmes de toutes les classes, les immigrantes, les 2LGBTQIA+ et les PANDC, les espaces sécuritaires et les possibilités de s’épanouir sont soit difficiles d’accès, soit rares et dispersés. Je suis ravie de faire partie d’une organisation qui aide les maisons d’hébergement à aider les femmes à trouver la meilleure façon d’obtenir le soutien dont elles ont besoin en tenant compte de l’intersectionnalité de leurs circonstances.

J’ai été très chanceuse de joindre l’équipe d’HFC au moment de la distribution de fonds aux maisons d’hébergement au nom du ministère des Femmes et de l’égalité des genres Canada (FEGC), alors que cela était plus que jamais nécessaire. J’ai eu l’occasion d’entendre directement des maisons dire combien ce financement leur a sauvé la vie et celle des femmes qu’elles servent. J’espère que ces récents efforts ne seront pas seulement un moment historique, mais la suite logique de la conversation en faveur d’un Plan d’action national contre la VFF.

L’arrivée dans mon nouvel environnement de travail n’a pas été de tout repos, mais avec une équipe si dévouée à soutenir les maisons d’hébergement et à mettre fin à la VFF, il est plus facile de rester motivée. Je vais m’employer à mettre en lumière les injustices dont sont victimes les survivantes de la VFF et à défendre les PANDC dans ce nouveau cadre.