Parfois nos efforts donnent vraiment des résultats! Hébergement femmes Canada a demandé au Comité permanent de la condition féminine d’entendre plus de voix d’organisations de femmes autochtones après qu’une seule de ces organisations ait présenté un témoignage pendant les neuf rencontres programmées. Tel que mentionné dans notre blog précédent, Sheila Malcolmson (NPD) a soumis une motion d’ajouter une rencontre additionnelle expressément vouée à recevoir des témoignages de femmes autochtones.

Viviane Michel présidente de l’Association des femmes autochtones du Québec et Rebecca Kudloo présidente de Pauktuutit Inuit Women of Canada

Le lundi 3 décembre, le Comité permanent a tenu cette session additionnelle dans le cadre de son examen sur le réseau de refuges et maisons de transition contre la VFF au cours de laquelle il a reçu exclusivement des témoignages d’organisations de femmes autochtones. Cette session était divisée en deux parties d’une heure chacune: Josie Nepinak, directrice de l’AwoTaan Healing Lodge Society et Viviane Michel, présidente de l’Association des femmes autochtones du Québec ont témoigné durant la première heure. Sharmila Chowdhury, personne-ressource en matière de transition au Minwaashin Lodge et Rebecca Kudloo (présidente), et Samantha Michaels (conseillère principale en matière de politiques) de Pauktuutit Inuit Women of Canada ont présenté leurs témoignages durant la deuxième heure.

Les témoins ont toutes été très éloquentes quant à la situation des filles et des femmes autochtones fuyant la violence, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des réserves. Voici quelques-uns des témoignages clés présentés pendant cette session additionnelle:

Rebecca Kudloo: « La ministre de la Condition féminine, Maryam Monsef, a reçu le mandat de veiller à ce qu’aucune personne fuyant la violence familiale ne se retrouve sans endroit où aller, en élargissant et en soutenant le réseau de refuges et de maisons de transition du Canada. Malgré cela, la violence faite aux femmes et aux filles inuites est demeurée une crise systémique nationale qui exige des mesures urgentes, éclairées et concertées. Au taux de 14 fois la moyenne nationale, soit le taux le plus élevé observé parmi tous les groupes de femmes au Canada, la violence frappe chez les femmes inuites et constitue une des principales causes évitables de blessures et de mortalité. La violence familiale est aggravée par la pauvreté, le chômage, la toxicomanie, les logements surpeuplés et les taux de suicide qui, selon les estimations, sont de 9 à 20 fois plus élevés que la moyenne nationale. »

Josie Nepinak: « Je crois souvent que nous nous attendons à des miracles en trois semaines, ce qui n’est pas juste pour les femmes et les enfants qui arrivent. En général, dans les familles autochtones, la femme est dans la vingtaine. Elle a habituellement trois enfants. Nous nous attendons à ce qu’elle trouve un logement, dans les 21 jours, et un soutien au revenu. Si elle a des problèmes liés à la protection de ses enfants ou à des ordonnances de protection d’urgence, ou si elle essaie simplement de sauver sa vie pendant ces trois semaines… il est parfois très difficile de vivre dans un établissement communautaire, comme un refuge, dans lequel il y a des règles. »

« Le financement est très différent pour les refuges des Premières Nations dans une réserve, où les directeurs des refuges doivent régulièrement faire l’épicerie dans leur propre garde-manger pour nourrir les femmes et les enfants, c’est horrible. »

Sharmila Chowdhury: « L’OshkiKizis Lodge est le seul refuge pour les femmes autochtones qui fuient la violence dans tout l’est de l’Ontario. Nous accueillons des femmes des Premières Nations, des Métisses et des Inuites de partout au Canada, y compris des collectivités et des réserves éloignées du Nord. Souvent, elles s’enfuient à cause du manque de confidentialité et de sécurité dans les petites collectivités, comme cela a été mentionné dans un autre groupe de témoins. Les travailleurs communautaires et le personnel des refuges, bien souvent, sont soit leurs tantes ou leurs cousins, alors elles ne peuvent pas agir dans l’anonymat pour échapper à la violence. C’est ainsi qu’elles se retrouvent à Ottawa, une grande ville un peu plus anonyme…Il y a aussi des femmes qui viennent de partout au pays. Nous avons eu une femme de l’Ouest, qui tentait de fuir son conjoint violent. Elle est allée à Calgary, je crois, puis s’est déplacée vers l’est, mais il réussissait toujours à la retrouver. Elle est enfin arrivée à Ottawa où, jusqu’à maintenant, il ne l’a pas trouvée. Ottawa est une ville plus anonyme et c’est parfois ce que ces femmes recherchent. »

Enfin, voici une liste de recommandations de Viviane Michel: « Notre première recommandation est d’octroyer un financement de base au Réseau des maisons d’hébergement pour femmes autochtones pour favoriser la formation et les échanges entre les maisons d’hébergement autochtones, au même titre qu’au Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et à la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes au Québec. »

Voici ses autres recommandations:

  • Il faut élargir les champs de services offerts en maison d’hébergement afin qu’ils correspondent davantage aux besoins et aux réalités des femmes autochtones vivant une situation de violence familiale et conjugale, ainsi qu’à la culture et aux traditions autochtones.
  • De mettre en œuvre des services destinés aux hommes ayant des comportements violents ou subissant de la violence. Ces derniers doivent prendre part au processus de guérison des nations autochtones.
  • Il faut consacrer dans les communautés plus de ressources humaines pour traiter de violence familiale et conjugale.
  • D’établir des protocoles d’entente interorganisations entre les maisons d’hébergement autochtones et allochtones, avec les policiers, les services sociaux, la Direction de la protection de la jeunesse et toutes les ressources susceptibles d’œuvrer dans le domaine de la violence conjugale.
  • Il faut sensibiliser les femmes autochtones au processus juridique entourant une situation de violence familiale et conjugale, notamment l’accompagnement juridique, le dépôt des plaintes, et le reste.
  • D’assurer un filet de sécurité pour les femmes autochtones vivant une situation de violence familiale et conjugale en leur offrant un choix de services adaptés à leurs besoins et à leurs réalités.
  • D’assurer un meilleur soutien financier aux services de police autochtones en favorisant la formation et le recrutement de femmes policières.
  • Il faut prévoir des ressources spécifiques pour venir en aide aux familles de femmes autochtones disparues ou assassinées.
  • De lancer une campagne de sensibilisation dans le but de venir en aide aux aînées qui subissent des violences de toutes sortes.

Le Comité va maintenant rédiger son rapport sur cet examen des refuges et maisons de transition pour femmes. Nous allons partager ce rapport sur les médias sociaux lors de sa publication (suivez-nous sur Facebook et Twitter @endvawnetwork).

Rencontre 10: Écoutez toute la rencontre de deux heures ici

Ou lisez les témoignages ici